Italie et Israël sont les seuls Etats, parmi les pays membres de l’OCDE, à avoir adopté un dispositif légal permettant aux actionnaires minoritaires d’élire un leur représentant au sein du conseil d’administration des sociétés cotées ou non cotées.
Une comparaison avec les mécanismes d’élection utilisés ailleurs, notamment par les Etats-Unis, Le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne, peut aider à comprendre mieux les caractéristiques du mécanisme du vote de liste italien.
Or trois étapes caractérisent la procédure de désignation des membres du conseil d’administration :
- L’identification de l’organe chargé de proposer la candidature à l’assemblée générale
- Le mécanisme de désignation utilisé par les actionnaires pour élire leur candidat
- La majorité nécessaire pour valider l’élection de l’administrateur.
Pour ce qui concerne le premier aspect, l’organe chargé de proposer la candidature à l’assemblée générale est, en principe, le conseil d’administration sortant qui doit proposer à l’assemblée générale les candidats à élire pour constituer le nouveau conseil. Cependant, les lois locales n’excluent pas a priori la possibilité que la présentation du candidat soit faite par les actionnaires.
Quant au mécanisme de désignation utilisé par les actionnaires pour élire leurs représentants, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne appliquent le mécanisme de vote dit « open list », qui permet aux actionnaires d’exprimer un vote pour chaque candidat sur la base du principe général de la majorité.
Aux Etats-Unis, les lois fédérales et les lois de chaque Etat imposent un mécanisme de vote dit « plurality voting » selon lequel sont élus les candidats qui ont obtenu le plus grand nombre de voix.
Contrairement aux Etats susmentionnés, le mécanisme du vote de liste italien (closed list) n’autorise pas les actionnaires à voter individuellement par chaque candidat, mais suppose la présentation de listes concurrentes. L’initiative de proposer la candidature à l’assemblée générale relève de la compétence du conseil d’administration seulement dans le cas où cette éventualité a été expressément prévue par les statuts. De fait, c’est l’actionnaire de contrôle et tous les autres actionnaires concernés qui sont habilités à présenter une liste de candidats.
Pour ce qui concerne le mécanisme de désignation et de la majorité requise pour valider l’élection de l’administrateur, le Code civil italien laisse à la libre autonomie des parties la tâche de définir les conditions et les modalités de la procédure de vote, qui soient les plus convenables et les plus adaptées aux exigences de l’entreprise.
Les statuts peuvent ainsi établir que l’élection des membres du conseil d’administration peut se faire (outre qu’à l’aide du vote à main levée ou par acclamation qui sont des systèmes utilisés notamment par les sociétés non cotées) sur la base de listes concurrentes. Dans ce dernier cas, les statuts donnent la possibilité de choisir entre le vote de liste majoritaire ou bien le vote de liste proportionnel.
Statistiquement, le vote de liste majoritaire est le plus utilisé. Selon ce système, la liste qui a obtenu la majorité – même relative – de votes se voit attribuer tous les sièges au conseil. Le vote de liste proportionnel suppose, par contre, que la répartition des sièges au sein du conseil soit faite de manière proportionnelle compte tenu du nombre de voix obtenus par chaque liste.
Cependant, ces deux mécanismes de vote ont un point en commun : sont désignés administrateurs, les candidats de la liste qui a obtenu la majorité – même relative – de votes ; la majorité absolue n’est pas requise.
Règles spécifiques pour les sociétés cotées
La loi n°262/2005 du 28 décembre 2005, portant sur la réforme de l’épargne, a consacré dans le TUF (Texte unique de la finance) le mécanisme du vote de liste et a établi que les statuts prévoient que les représentants des actionnaires minoritaires doivent être élus sur la base de listes concurrentes.
Pour tenir compte de l’évolution des pratiques de gouvernance, le législateur italien a élargi le champ d’application de ce dispositif. Tous les membres du conseil d’administration y compris : les administrateurs représentants le sexe moins représenté, les administrateurs représentant les actionnaires minoritaires et les administrateurs indépendants peuvent être élus sur la base de listes de candidats. En particulier, le TUF précise que :
- Au moins un tiers des membres du conseil d’administration doit appartenir au sexe moins représenté.
- Au moins un membre du conseil d’administration doit être élu par la liste des actionnaires minoritaires qui a obtenu le plus grand nombre de voix. Cette liste ne doit pas être liée, même indirectement, aux associés qui ont présenté et voté la liste arrivée en première position.
- Au moins un membre du conseil d’administration ou bien deux membres – si le conseil compte plus de sept membres – doivent remplir les conditions d’indépendance[1].
L’application de ce dispositif est donc faite sur base volontaire. Ce sont les statuts qui doivent établir les conditions, les modalités et le seuil de participation à partir duquel les actionnaires peuvent présenter leurs listes. Si les statuts sont muets à ce sujet, le seuil de participation ne peut pas excéder le quarantième du capital social ou les seuils déterminés par la CONSOB avec son propre règlement compte tenu de la capitalisation boursière, du flottant et de la structure actionnariale de la société[2].
Chaque actionnaire – seul ou ensemble avec d’autres actionnaires représentant le pourcentage déterminé par la loi ou par la CONSOB – peut présenter une liste qui ne doit pas contenir plus de candidats que de sièges à pourvoir. Un candidat ne peut figurer que sur une seule liste à la même élection.
Les listes doivent être signées par les associés qui les ont présentées, doivent être déposées auprès du siège social au moins vingt-cinq jours avant la date de l’assemblée générale convoquée pour élire les membres des organes de gouvernance et doivent être mise à la disposition du public auprès du siège social, sur le site Internet ou selon les autres modalités établies par la CONSOB.
En conclusion, le vote de liste a sans doute contribué à améliorer la gouvernance des sociétés cotées italiennes ouvrant les salles des conseils d’administration aux représentants des actionnaires minoritaires et donc aux investisseurs internationaux, qui ont largement profité de ce mécanisme de gouvernance.
gp@giovannellapolidoro.com
[1] v. Article 147-ter du TUF (Décret législatif n°58 du 24 février 1998).
[2] v. Règlement n°11917/1999 de la CONSOB.
Les précisions sur les modalités de désignation des représentants des actionnaires minoritaires au conseil d administration des sociétés peuvent diverger mais sont importantes pour la vie même de l entreprise. Mais quelle doit être la valeur juridique de ces modalités ? Doivent elles être précisées par la loi, les statuts, le règlement intérieur, le code de gouvernance, le code de conduite, la charte de l administrateur, ou un simple règlement de l entreprise ? That’s the question.
Il s’agit d’une question très sensible. L’Italie a choisi de fixer les principes généraux dans la loi et dans le Réglement de la CONSOB et a laissé libres les sociétés d’établir de fixer dans les statuts les modalités de fonctionnement du vote de liste