Le 30 décembre 2020, le Comité italien corporate governance a rendu public son Rapport annuel sur l’évolution de la corporate governance des sociétés cotées. Rédigé par le secrétariat technique du Comité sur la base des données analysées par Assonime (Association italienne des sociétés par actions), ce huitième rapport annuel s’est concentré sur quatre thématiques : le fonctionnement des assemblées générales annuelles (AG) dans le contexte lié à la pandémie de Covid-19, l’évolution du cadre national et européen en matière de gouvernance d’entreprise, l’application du Code d’autodiscipline et les recommandations pour l’année 2021.

Fonctionnement des AG 2020

Le Comité s’est planché sur les modalités pratiques de tenue des AG 2020. Le décret législatif n°18 du 17 mars 2020 (dit Cura Italia) adopté par le Gouvernement italien en pleine crise sanitaire a permis – en dérogation aux normes visées par la loi et les statuts – le déroulement des assemblées générales annuelles (AG) à huis clos sans la présence physique des actionnaires. Les conseils d’administration ont fait des réels efforts pour faciliter la participation et l’expression des actionnaires (vote par correspondance, par voie électronique, par procuration ou à travers la désignation d’une personne mandatée). La quasi-totalité des sociétés cotées se sont conformées aux modalités visées par le décret et, dans ce cas, les actionnaires ont préféré se faire représenter par une personne de leur choix.

Néanmoins, la gestion des AG à huis clos à mis en évidence certains problèmes de gouvernance :

  • Droit de poser des questions

En vue de faciliter le droit de vote, la moitié des sociétés cotées se sont engagées à fournir aux actionnaires des réponses dans les délais les plus brefs (généralement deux jours avant la réunion de l’AG), tandis que dans les autres cas (l’autre moitié de l’échantillon), les sociétés se sont engagées à répondre « au plus tard » lors de l’AG.

  • Proposition de projets de résolution

Etant donné l’inapplicabilité des règles qui prévoient la possibilité de soumettre directement à l’AG les projets de résolution proposés par les actionnaires, un tiers des sociétés qui ont prévu l’utilisation exclusive du représentant désigné ont décidé de permettre même aux actionnaires qui détiennent une participation inférieure à 2,5 % de présenter leurs propositions avant l’AG (en moyenne 15 jours avant la réunion).

  • Information aux actionnaires en cas de renouvellement du CA

Ces mêmes sociétés se sont également engagées à fournir aux actionnaires toute information visant à éclairer les conséquences des résolutions proposées, particulièrement celles qui concernent la nomination et composition du conseil, la nomination du président et des membres de l’organe de contrôle, et la détermination de la rémunération des administrateurs.

Evolution du cadre national et européen en matière de gouvernance

Au cours de ces dix dernières années, les législateurs nationaux et européens ont remis en cause la gouvernance d’entreprise. Cette évolution a permis de favoriser la participation active des actionnaires et des autres parties prenantes à la vie des sociétés cotées en vue de renforcer la création de la valeur à long terme. Mais, elle s’est traduit aussi dans la prise en compte des critères extra-financiers en mettant ainsi l’accent sur les liens étroits existant entre la gestion de l’entreprise et les objectifs environnementaux, sociaux, et de gouvernance (EGS) liés à l’exercice de l’activité. Cette année, le rapport du Comité s’est particulièrement concentré sur les questions suivantes :

Transposition et mise en œuvre de la Directive UE 2017/828

Le décret législatif n°49 du 10 mai 2019 a transposé dans le droit italien la Directive UE 2017/828, modifiant la Directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires des sociétés cotées. Les principales nouveautés introduites par le dispositif européen concernent :

  • Identification des actionnaires : toute société cotée peut demander à ses intermédiaires financiers de lui communiquer les informations permettant d’établir l’identité de ses actionnaires.
  • Participation effective des actionnaires à la vie sociale des entités cotées à travers l’exercice du droit de vote lors des assemblées générales.
  • Augmentation du niveau de transparence des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d’actifs.
  • Renforcement du contrôle des actionnaires sur la rémunération des dirigeants et sur les opérations avec les parties liées.

Le Comité constate que le cadre législatif national avait déjà anticipé à bien des égards les choix adoptés par le législateur européen, notamment pour ce qui concerne l’adoption de la politique de rémunération des dirigeants et les opérations avec les parties liées. Conformément aux exigences européennes, le législateur italien a partiellement modifié les dispositions du Code civil et du Tuf, ce qui a permis d’introduire des sanctions pécuniaires et administratives plus sévères en cas de manquement aux dispositions relatives à ces deux domaines. Cependant, le Comité relève que le processus de transposition et de mise en œuvre de la Directive UE 2017/828 n’a pas été encore complété. On attend l’adoption des nouvelles dispositions réglementaires en cours de finalisation.

Dialogue européen sur la gouvernance durable

Dans le cadre du Plan d’Action 2018 sur la finance durable, la Commission européenne a multiplié les initiatives pour réorienter les flux de capitaux vers une économie plus durable, intégrer la durabilité dans la gouvernance d’entreprise et favoriser la transparence et les investissements durables. Le Comité participe activement aux discussions informelles et à l’élaboration de positions communes avec les présidents des principaux comités européens (Allemagne, Belgique, France, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède). Ce forum informel reconnaît que la gouvernance d’entreprise peut grandement contribuer à une économie durable. Par ricochet, les Codes de gouvernance doivent promouvoir les meilleurs pratiques afin de permettre aux conseils d’administration d’élaborer une stratégie de croissance durable.

Application du Code d’autodiscipline

La plupart des sociétés cotées italiennes ont désigné le Code d’autodiscipline comme leur Code de référence. Au total, 220 sociétés cotées sur le marché MTA géré par la Bourse italienne, ont été étudiées. Le Comité constate que le degré de conformité aux dispositions du Code d’autodiscipline par les sociétés qui y font référence continue de s’améliorer. Le Comité relève que les recommandations du Code d’autodiscipline concernant la structure et la composition du conseil d’administration et les politiques de rémunération atteignent un fort taux de conformité (entre 80% et 67%). Toutefois des faiblesses persistent. Les plus importantes concernent le processus d’évaluation de l’indépendance des administrateurs (45%) et le fonctionnement efficace du conseil (47%). Malgré cela, le bilan du Comité reste tout de même positif dans l’ensemble : les pratiques de gouvernance ont évolué par rapport à l’année 2019.

Recommandations pour l’année 2021

En vue de l’application des nouvelles dispositions visées par le Code d’autodiscipline révisé, en janvier 2020, le Comité a adressé une lettre aux conseils d’administration pour faire évoluer, tout au long de l’année 2021, la qualité des pratiques de gouvernance sur certaines questions :

  • Développement durable: le Comité invite les conseils d’administration à intégrer le développement durable dans la stratégie de l’entreprise, dans le système de contrôle interne et dans la définition des rémunérations des dirigeants et administrateurs.
  • Information sur les séances du conseil : le Comité recommande aux conseils d’améliorer les temps et les modalités de communication de l’information destinée aux administrateurs, et de rendre compte des mesures mises en œuvre dans le rapport de gestion annuel.
  • Indépendance des administrateurs : le Comité recommande aux conseils de justifier les raisons pour lesquelles ont décidé de ne pas prendre en compte un ou plusieurs critères d’indépendance.
  • Evaluation du CA : le Comité recommande aux conseils d’évaluer la contribution de chaque administrateur dans la définition et mise en œuvre de plans stratégiques et d’en superviser le processus d’évaluation.
  • Comité des nominations et définition d’un plan de succession : le comité des nominations est chargé d’assister le conseil d’administration dans la sélection des candidats aptes à exercer la fonction d’administrateur. En cas d’unification des comités de nominations et de rémunérations, le Comité recommande aux conseils de motiver leur choix dans le rapport annuel de gestion. Concernant les plans de succession, le Comité invite les conseils des grandes entreprises à établir de tels plans et à faire évoluer les pratiques de gouvernance dans ce domaine. Ce type de plans – remarque le Comité – a été adopté et mis en œuvre seulement dans de rares cas.
  • Politique de rémunération des dirigeants : le Comité recommande aux conseils d’administration de fournir des informations claires sur les éléments composant la rémunération variable annuelle et pluriannuelle des dirigeants, ainsi que sur les critères de performance extra-financiers appliqués. Il invite les conseils à limiter le versement des rémunérations exceptionnelles (bonus) et à préciser les critères d’attribution des indemnités de départ. En outre, le Comité recommande aux conseils de veiller à ce que la rémunération des administrateurs non exécutifs et des membres de l’organe de contrôle tient compte de la compétence, du professionnalisme et de l’engagement de ces derniers.

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